Le déploiement irrésistible de la norme individualiste a produit un changement d’ampleur dans la conception de la liberté. Celle-ci, constitutive de l’individu, a connu une dilatation si forte qu’elle a débouché sur un mythe, ou sur un fantasme, celui de l’autoconstitution du sujet. L’individualisme contemporain se nourrit de ce mythe selon lequel l’individu ne doit qu’à lui-même l’essentiel de ce qu’il est, ou – dans une version moins maximaliste – ne doit à la société, dans ce qui constitue son identité personnelle, que la modeste part librement acceptée par lui, car compatible avec sa singularité native.